Photographier sous les jupes des filles n’est pas un délit !
Photographier l’intimité de femmes à leur insu dans une grande surface n’entraîne aucune conséquence d’un point de vue pénal. C’est ce qu’ont appris deux prévenus pris en pleine action à quelques mois d’intervalle dans le même magasin saint-pierrois. Explications.
Les faitsFrédéric numéro 1. Frédéric habite Saint-Pierre et fait ses courses au supermarché Géant.
Accro aux dessous féminins, l’homme âgé de 74 ans se sert de son téléphone portable afin d’immortaliser l’entrejambe de ses proies.
Le 12 mai 2006, le retraité se promène de manière curieuse dans les allées de la grande surface.
Les yeux rivés sur l’écran de contrôle du système de vidéosurveillance, un agent de la sécurité du magasin surprend son drôle de stratagème. L’énergumène est une première fois stoppé dans sa frénésie de voyeurisme, au moment même où le mari d’une de ses proies se trouve à deux doigts de le corriger.
L’obsédé reconnaît benoîtement les faits et jure qu’on ne l’y reprendra plus.
Il quitte le supermarché.
L’avertissement ne démonte pas plus que cela le vieil homme.
Bien au contraire. Le 12 septembre 2006, il repart en chasse dans les allées de son commerce préféré.
Armé de son GSM, il se penche à deux reprises près de clientes puis glisse l’objectif de son appareil photo sous leurs jupes.
Cette fois, il est interpellé par les gendarmes de la brigade de Saint-Pierre. Placé en garde à vue, le septuagénaire reconnaît son vice et jure aux enquêteurs que c’est la dernière fois...
Frédéric numéro 2. Frédéric, 43 ans, est surpris le lendemain dans le même magasin. Le formateur, domicilié à Saint-Pierre, s’est muni d’un petit appareil photo numérique, emprunté à son patron. Son mode opératoire est plus discret. Il dispose l’objet dans le fond de son sac à provision. Puis, lorsqu’il se trouve au plus près des jambes d’une femme en jupe ou en robe courte, il glisse son sac en dessous. Les vigiles du supermarché sont devenus des habitués de ce genre de personnages. Arrêté par un agent du magasin, il explique vouloir tester l’efficacité de l’appareil photo. Les gendarmes de Saint-Pierre le placent en garde à vue. Le matériel et les images sont saisis. Il assure que les photographies n’étaient destinées qu’à son usage personnel. Le suspect est remis en liberté.
Frédéric numéro 1 une nouvelle fois. Les surveillants vont de surprise en surprise.
À la mi-novembre, ils retrouvent l’incorrigible retraité.
Cette fois, il s’est placé à proximité d’un jeu à roulettes.
Il profite que les clientes sont penchées sur le jeu pour se rincer l’œil.
Le gramoune est sur ses gardes.
Se sachant découvert, il déguerpit à toute vitesse.
Les hommes de la sécurité ne parviennent pas à lui mettre la main dessus. Mais ce n’est que partie remise.
Au début du mois de décembre, le pervers est de retour au supermarché. Encore une fois, il est surpris à d’autres préoccupations que ses commissions.
À l’arrêt dans le rayon charcuterie, il s’offre une vue en contre-plongée sur la petite culotte d’une cliente penchée sur les victuailles.
Cette fois-ci, il est repéré sur un écran de la vidéosurveillance. Pour la seconde fois en moins de trois mois, il est appréhendé et placé en garde à vue. Il joue de nouveau à l’ingénu, et se montre incapable d’expliquer ses comportements déviants.
L’audienceReprésenté par Me Stéphanie Saint-Bertin, le septuagénaire ne s’est pas rendu à l’audience.
Dans ses diverses déclarations, il persiste dans la mauvaise foi. “Questionné sur le mobile, le prévenu a déclaré ne pas savoir ce qui lui a pris. Il s’est dit surpris par son comportement”, explique le président du tribunal Bruno Vidon.
Des sourires dissimulés se dessinent sur les visages du magistrat et de ses assesseurs.
Le substitut du procureur Hélène Bigot prend la parole pour le premier cas de voyeurisme. “Je me trouve face à un problème de qualification pénale. Je ne suis pas sûre que ce méfait soit constitutif d’une infraction”, reconnaît-elle.
L’avocate du gramoune saisit la balle au bond. “Je suis prise des mêmes doutes. On ne peut pas considérer que le supermarché soit un lieu privé au sens du droit pénal”, assure Me Stéphanie Saint-Bertin.
Le quadragénaire, présent à la barre, se montre encore très embarrassé. “Je reconnais que ce n’est pas un comportement brillant”, confie le prévenu.
Il courbe l’échine face aux réquisitions du parquet. “Rien ne peut excuser ce genre d’atteinte à la vie privée d’une femme”, insiste-t-elle.
Cette fois encore, elle renonce à une qualification pénale adéquate.
JugementFrédéric, 74 ans : renvoyé des fins des poursuites.
Frédéric, 43 ans : renvoyé des fins des poursuites.
saintpierremeister